Le rythme
est la cadence du vers (mouvement, ondulation lors de la déclamation du
vers)
Pour mieux
analyser le rythme d’un vers, il faut considérer les autres vers.
Ayez pour la cadence une oreille sévère :
Que toujours dans vos vers, le sens coupant
les mots,
Suspende l’hémistiche, en marque le repos
(…)
Le vers le mieux rempli, la plus noble
pensée
Ne peut plaire à l’esprit, quand l’oreille
est blessée. (Nicolas Boileau, L’art
poétique, 1674)
Quand/ la/
feuil/le/ des/ bois // tom/be/ dans/ la/ prai/rie (une pause longue et césure // et
pause courte
/)
1 5 1 5
Le/ vent/ du/
soir/
s’é/lè/v(e) //et/ l’ar/ra/ch(e) aux/ val/lons.
4 2 3 3
NB : Les syllabes soulignées sont
celles qui portent les accents.
La présence
de césure permet de parler de rythme binaire. Cette pause au milieu du vers coïncide
avec le sens des groupes et coupe le vers en deux parties égales appelées
hémistiches (ce que précise le conseil de Boileau dans sa définition).
Si
maintenant, une pause au milieu est impossible dans l’alexandrin, le rythme est
ternaire ; et on aura trois accents (c’est-à-dire trois pauses longues).
Et /qui sait/
si/ les/ fleurs/ nou/vel/les/ que/ je/ rêv(e) (pause impossible à fleurs à cause de l’adjectif « nouvelles »)
3
5 4
Trouveront
dans ce sol lavé comme une grève
Le mystique
aliment qui ferait leur vigueur. ("L’Ennemi" Baudelaire, Les
Fleurs du mal, 1857)
Dans le
premier vers, le rythme est donc ternaire 3/5/4.
Pour
interpréter donc un rythme, on prêtera attention aux mouvements. On part des
notions suivantes pour le rythme régulier par exemple
régulier :
2/4//2/4 ; 1/5//1/5 ; 4/2//4/2, etc.
irrégulier :
2/4//1/5 ; 3/3//2/4 ; etc.
constant :
3/3//3/3
Puis, on
verra ce que ce rythme caractérise : la régularité (associée aux sons
répétés) peut suggérer une cadence régulière, lente, monotone, mais aussi la
mélancolie ; Le rythme irrégulier traduit le caractère rapide, saccadé et heurté,
le bouleversement, le trouble des sentiments, l’agitation.
Soyez vigilant,
le rythme insiste toujours sur ce qui est évoqué dans le texte.
Les procédés rythmiques peuvent venir
bouleverser le rythme du vers pour surtout mettre en relief un aspect. Il s’agit
du rejet, du contre-rejet et de l’enjambement.
Pour marquer
la fuite inexorable du temps, donc la continuité, Lamartine utilise l’enjambement qui est une figure dont
la particularité est de prolonger le sens de la phrase d’un vers sur le vers
suivant, au moins au-delà de l’hémistiche, et parfois sur plusieurs vers :
« Le lac »
Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux
rivages,
Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
Jeter l'ancre un seul jour ?
(…)
Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en
silence ;
On n'entendait
au loin, sur l'onde et sous les cieux,
(Ici la restriction « ne…que »
assure la continuité du sens)
Que le bruit des rameurs qui frappaient en
cadence
Tes flots harmonieux.
L'enfant
avait reçu deux balles dans la tête.
Le logis
était propre, humble, paisible, honnête ;
On voyait un
rameau bénit sur un portrait.
Une vieille
grand-mère était là qui pleurait.
Nous le
déshabillions en silence. Sa bouche,
Pâle,
s'ouvrait ; la mort noyait son œil farouche ;
Ses bras
pendants semblaient demander des appuis. ("Souvenir de la nuit du 4"
Hugo, Les Châtiments).
En faisant
un contre-rejet avec le mot « bouche »
en fin de vers, le poète le met en relief.
La
sultane regarde et la mer qui se brise
Là-bas,
d'un flot d'argent, brode les noirs îlots. (Hugo, Les Orientales.)
En plaçant
le mot « Là-bas » en position de rejet,
le poète insiste sur le mot et accentue l’éloignement évoqué. Cela favorise une
sorte d’hallucination avec les reflets connotés par le mot « argent ».
Exercice : Identifiez dans cette strophe un contre-rejet et un enjambement ?
Et de
longs corbillards sans tambour ni musique
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir
Vaincu pleure et l'Angoisse atroce, despotique
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir. (Baudelaire, Les Fleurs du mal.)
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir
Vaincu pleure et l'Angoisse atroce, despotique
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir. (Baudelaire, Les Fleurs du mal.)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire