INTRODUCTION
Le classicisme
est un mouvement littéraire qui se développa en France, et plus
largement en Europe,
dans la deuxième moitié du XVIIe siècle.
Il désigne un ensemble de valeurs et de critères qui définissent un idéal
s'incarnant dans l’« honnête homme » et qui développent une esthétique
fondée sur l'idéal de perfection. C’est cet idéal de perfection qu’on retrouve
dans toutes les œuvres classiques et particulièrement dans PHEDRE. En
effet dans cette pièce de théâtre Jean Racine écrit dans la préface que :
« Les moindres fautes y sont sévèrement punies. La seule pensée du
crime y est regardée avec autant d’horreur que le crime lui même. Les
faiblesses de l’amour y passent pour de vraies faiblesses. Les passions n’y
sont présentées aux yeux que pour montrer tout le désordre dont elles sont
cause ; et le vice y est peint partout avec des couleurs qui en font
connaître et haïr la difformité. »
I.
Biographie et bibliographie de Jean
Racine
1- Biographie
Jean Racine
naquit en 1639 à La Ferté-Milon, au sein d'une famille de notables locaux sans
éclat, fonctionnaires modestes ou gens de loi. Très tôt orphelin, il est
recueilli par sa grand-mère maternelle, qui, devenue veuve, l'emmène avec elle
à l'abbaye de Port-Royal
des Champs. Le petit Racine est autorisé à suivre gratuitement
l'enseignement que dispensent les maîtres des " Petites
Ecoles " rattachées au monastère.
Il y fait de solides
humanités,
qui façonnent en lui un goût et une sensibilité littéraires précoces. Ses
études terminées, après un an de philosophie au collège d'Harcourt à Paris, le
jeune homme s'installe en 1659 dans la
capitale,
Jean Racine écrit des poèmes à la gloire du roi. Il est
présenté à la Cour, et s’inscrit dès 1664 sur la liste des gratifications
royales. Il élargit le cercle de ses relations, rencontre Boileau
et surtout Molière,
dont la troupe accepte de jouer La Thébaïde, qui n'a pas grand
succès. En revanche, en 1665, Alexandre est une réussite,
mais aussi l'occasion d'une brouille retentissante avec Port-Royal, hostile au
théâtre, et d'une rupture avec Molière, à qui le jeune auteur retire sans
préavis sa pièce pour la porter à la compagnie rivale de l'Hôtel
de Bourgogne, dont les acteurs ont la réputation d'être les meilleurs
tragédiens du temps.
Dès lors, pendant une dizaine
d'années, la vie de l'homme va se confondre avec la carrière prestigieuse et
fructueuse d'un écrivain dramatique qui ne cessera plus de voler de succès en
succès.
Et puis Racine
cesse brusquement d'écrire pour la scène, et il entame une seconde carrière
pour ainsi dire, officielle et toute remplie d'honneurs, qui va faire de lui
l'un des familiers de Louis XIV. L'écrivain avait été élu à
l'Académie
française dès 1673. Deux nominations à des postes considérables et
enviés, celui d'historiographe du roi et celui de " gentilhomme
ordinaire de la Chambre ", ponctuent et parachèvent, en 1677 puis en
1690, la brillante ascension sociale du courtisan. Marié en 1677, père de
famille, homme riche, célèbre et estimé du prince, Racine n'a plus rien à
désirer des biens de ce monde. Sa plume lui sert désormais à relater les hauts
faits du monarque et à entonner sa louange.
Il revient
tardivement au théâtre, en donnant, à la demande de Mme de Maintenon, que Louis
XIV a épousée en secret après la mort de sa première femme, deux pièces
bibliques, Esther en 1689, Athalie en 1691, qui
marquent un renouvellement de son art et connaissent la même faveur que les
tragédies du passé. Les dernières années sont celles d'un chrétien du temps :
les valeurs religieuses finissent par l'emporter sur les grandeurs terrestres.
Racine, qui s'était réconcilié avec Port-Royal dès 1679, et qui pratiquait
assidûment la Bible, meurt en 1699 " avec des sentiments de piété
très vifs et très édifiants ". Le défunt est inhumé, selon ses désirs
et avec l'autorisation du roi, à Port-Royal, auprès de la tombe de l'un de ses
anciens maîtres.
2- Bibliographie :
Jean Racine a surtout écrit des
pièces de théâtres parmi lesquelles nous pouvons citer :
La Thébaïde (juin 1664), Alexandre
le Grand (décembre 1665), Andromaque
(novembre 1667), Les Plaideurs
(novembre 1668), Britannicus (décembre 1669), Bérénice (novembre
1670), Bajazet (janvier 1672), Mithridate (janvier 1673), Iphigénie
(août 1674), Phèdre (janvier 1677), Esther (janvier 1689), Athalie
(janvier 1691)
II.
Structure et résumé de la pièce
1-
Structure
La pièce Phèdre
reprend la structure dramatique du
théâtre classique, c’est-à-dire qu’elle respecte les cinq actes, dont une
exposition, un nœud et un dénouement tragique, autrement dit la fin par un bain
de sang ou la mort. La structure se présente de la manière suivante :
L’acte I compte 5scènes ; L’acte II compte 6 scènes ; L’acte III compte 6 scènes ; L’acte IV compte 6 scènes ; L’acte V compte 7 scènes
2-
Résumé:
A Trézène, en Grèce, à une époque
fort lointaine, Phèdre, seconde épouse du roi Thésée, est tombée amoureuse de
son beau-fils Hippolyte. Cette passion lui semble si monstrueuse qu'elle se
résout à mourir plutôt que d'avouer son amour. Ne pouvant toutefois supporter
le chagrin de sa nourrice Œnone, qui la voit dépérir, elle lui confie l'origine
du mal qui la consume. Bientôt circule la rumeur de la mort de Thésée, absent
depuis de longs mois. Sa succession au trône ouvre une crise politique. Phèdre
consulte Hippolyte; mais, troublée par la présence du jeune homme, elle finit
par lui avouer qu'elle l'aime. Hippolyte s'enfuit, horrifié. Thésée serait
vivant, apprend-on aussitôt après. Phèdre mesure I'horreur de sa situation. Et
si Hippolyte venait à parler? Œnone lui suggère de prendre les devants et
d'accuser Hippolyte de tentative de viol. Phèdre s'indigne, puis, accablée,
laisse Œnone agir à sa guise. Celle-ci le dénonce à Thésée dès son retour.
Désespoir et fureur de Thésée. Pour preuve de son innocence, Hippolyte lui
révèle qu'il aime Aricie. Thésée ne le croit pas. Honteuse et repentante,
Phèdre accourt pour lui révéler la vérité. Mais elle apprend par la bouche
d'Œnone qu'Hippolyte aime Aricie. Jalouse, elle décide de ne rien dire. Malgré
I'intervention d'Aricie, Thésée demande à Neptune de punir son fils. 'Œnone se
suicide, désespérée de se voir condamnée par Phèdre. Un dragon, surgi de la mer
sur ordre de Neptune, tue Hippolyte. Phèdre confesse son crime à Thésée et
s'empoisonne.
3.
Résumé de
la pièce par actes
Acte I - Hippolyte,
fils de Thésée et d’une Amazone (nommée Antiope), annonce à son confident,
(nommé Théramène) son intention de quitter la ville de Trézène pour fuir son
amour pour Aricie, sœur des Pallantides, un clan ennemi de Thésée. Phèdre,
épouse de Thésée, avoue à none, sa nourrice et confidente, la passion qu’elle
ressent pour son beau-fils Hippolyte. On annonce la mort de Thésée.
Acte II - Aricie
confie à sa servante (nommée Ismène) qu’elle est amoureuse d’Hippolyte ;
celui-ci arrive et dévoile ses sentiments. Phèdre vient voir Hippolyte afin de
défendre les droits de son jeune fils à la succession de Thésée ; et déclare
son amour à Hippolyte qui la rejette.
Acte III - Thésée,
qui n’est pas mort, arrive à Trézène et s’étonne de recevoir un accueil si
froid : Hippolyte veut fuir sa belle-mère et il envisage d’avouer à Thésée son
amour pour Aricie, Phèdre est submergée par sa culpabilité. Elle vole même
l’épée d’Hippolyte, ce qui empêchera ce dernier de se défendre moralement
durant le dernier acte.
Acte IV - none,
qui craint que sa maîtresse ne se donne la mort, déclare à Thésée qu’Hippolyte
a tenté de séduire Phèdre. Thésée bannit Hippolyte et prie le dieu Neptune de
le tuer. Phèdre veut le faire changer d’avis mais elle apprend qu’Hippolyte
aime Aricie. Furieuse d’avoir une rivale, elle renonce à le défendre.
Acte V- Hippolyte
part après avoir promis à Aricie de l’épouser hors de la ville. Thésée commence
à avoir des doutes sur la culpabilité de son fils, mais la nouvelle de sa mort
survient. Phèdre avoue tout à Thésée, après avoir banni none qui s’est ensuite
jetée dans les flots; elle a pris auparavant du poison et s’effondre sur scène.
Thésée, pour venger son fils et respecter la dernière volonté d’Hippolyte,
décide d’adopter Aricie.
III.
Les
personnages
1 - Thésée : Thésée est un homme
d’âge mûr, déjà écrasé par sa légende, il est le fils d’Égée roi d’Athènes
il succède ce dernier au trône après avoir délivré athénée du Minotaure, il
enlève et épouse Anthiope (mère d’Hippolyte). A la mort d’Anthiope il épouse
Phèdre. Son fils éprouve, face à lui, un complexe d’infériorité et ne cesse de
rêver d’aventures pour se faire un nom comparable. Quand il est absent (début
de la pièce), Thésée est sans cesse évoqué : on le cherche(Hippolyte), on
évoque ses exploits et son allure(Phèdre), on le craint (Aricie)
2- Hippolyte :
fils de Thésée et d’Anthiope, reine des amazones Il incarne la pureté, la
sérénité et la tendresse dans les sentiments Il n’a ni la complexité ni la
puissance brisée de son père Dans le mythe grec, Hippolyte est un Athènes
sauvage qui à fait vœu de chasteté Il
résiste à l’amour pour Aricie uniquement par crainte de désobéir à son père.
3- Phèdre :
présente dans 12 scènes sur 30, Phèdre est pourtant omniprésent tout au long de
l’action C’est une femme jeune, guère plus âgée qu’Hippolyte. Son amour pour
son beau-fils est un Inceste au regard des convenances sociales et non d’un
point de vue génétique Aussi bien cet amour est –il d’abord désir, attirance
physique, comme si Phèdre revivait ce qu’elle avait ressenti, toute jeune
femme, en voyant Thésée Phèdre, subissant la fatalité vengeresse des dieux,
lutte à armes inégales: elle a beau s’éloigner d’Hippolyte, les circonstances
l’obligent à le revoir Dés lors, elle plonge et fait a Hippolyte une déclaration
incontrôlée, car elle subit les ravages d’une passion obsessionnelle Elle est
la fille de Minos et de Pasiphaé. Elle est habité par des puissances magiques
qui la dépassent (fatalité, « vénus toute entière à sa proie
attachée »).
4- Oenone :
nourrice et confidente de Phèdre, dévouée corps et âme de Phèdre
5- Aricie :
princesse du sang royal descendante des Pallantides, famille princière qui
disputa le trône d’Athènes à leur oncle Égée père de Thésée. Elle est l’amour
d’Hippolyte et ses parents furent les ennemis de Thésée Elle a quelques fiertés
et elle est la rivale de Phèdre
6- Théramène :
gouverneur d'Hippolyte
7-
Ismène :
confidente d'Aricie
8-
Panope : femme de la suite de Phèdre
9-
Gardes : Les gardes
s’occupent de la sécurité dans le palais.
IV.
Quelques thèmes développés
1.
L’amour
et la passion
Chez Racine, les deux notions
occupent une place centrale surtout dans Phèdre. Elles sont associées
sous le terme amour-passion. Dans la pièce, Jean Racine fait la part des choses
entre l’Amour (sentiment naturel et noble ) et la passion. Quand l’amour est
présenté comme une fatalité, comme une crise, il se transforme parfois en passion,
en haine qui conduit irrémédiablement au malheur, à la mort car il devient un
sentiment incontrôlable.
Dans la pièce, la passion de
Phèdre provoquera sa mort et celle de plusieurs personnages.
- Le destin
C’est le destin qui provoque la
fatalité. Il se manifeste sous le signe de la prédestination. La notion de
destin réunit deux thèmes : la puissance divine qui détermine le cours des
événements et ensuite l’enchainement des événements eux-mêmes qui s’accélèrent.
Le destin se joue sur deux plans : la volonté des dieux et les relations
complexes des comportements humains.
- Les dieux
L’univers des dieux est
intimement lié à celui des humains : les Dieux agissent directement sur la
vie des hommes ; ils protègent les humains mais parfois les punissent.
Cependant, l’image des dieux est assez négative. Ils sont omniprésents et
interviennent dans les conflits opposant les hommes.
- La jalousie
C’est la jalousie qui unit les
deux faces de la passion : l’amour et la haine. C’est ce qui explique
qu’on passe de l’un à l’autre. La jalousie participe à une définition de
l’amour ; Jean Racine y voit un instinct de possession propre à la nature
humaine. Dans la jalousie c’est l’orgueil qui est blessé et qui demande
réparation quitte à tomber dans le crime ou l’immoralité.
V.
Le style
La tragédie était, au XVIIe
siècle en France, le genre noble par excellence. C'est un genre codé, qui
connut une période de maturité, d'équilibre et d'intégration des règles avec
l'œuvre de Racine.
Les règles de la tragédie
classique tendent à réaliser la perfection de la création: cette perfection est
fondée d'une part sur le principe de la mimésis (imitation de la nature), qui a
pour finalité la peinture la plus fidèle du cœur humain. Ainsi pour être plus
proche de la réalité Racine respecte la règle des trois unités dans sa pièce :
- La règle de l'unité de temps exige que le
temps de la représentation soit le plus proche possible du temps réel de
l'action représentée; elle exige, en tout cas, que la durée réelle de l'action
représentée n'excède jamais vingt-quatre heures.
-
La règle de l'unité de lieu découle de la précédente, par souci de
vraisemblance, car dans un laps de temps très court, il n'est guère possible de
multiplier avec réalisme les lieux de l'action. Dans Phèdre on n’a qu’un seul
lieu : le palais.
- La
règle de l'unité d'action exige que toutes les scènes, tous les gestes et tous
les propos échangés par les personnages servent à expliquer, à motiver ou à
faire avancer une même et unique action. Chaque détail se trouve alors subordonné
à l'ensemble, aucun élément ne doit être gratuit ni dépourvu de conséquence
directe sur l'action. Dans la pièce L’action principale reste la passion que
Phèdre éprouve pour Hippolyte.
Conclusion
Phèdre vient
d’expirer. Avec elle s’est éteinte la « flamme funeste » de la passion malheureuse et meurtrière. Le
jour retrouve toute sa pureté. Ce retour à la lumière symbolise peut-être la
victoire du Bien sur le Mal et en tous les cas celle du normal sur le
monstrueux. Tout peut désormais rentrer dans l’ordre de la morale. Bien que
l’action s’achève par trois morts, la fin de l’œuvre ne se ferme pas sur le
malheur. Les dernières paroles de Thésée sont porteuses d’espoir : sa
réconciliation avec Aricie est une promesse de justice dans un apaisement retrouvé.
Quant à nous, nous quittons des personnages qui, jusqu’à la fin, nous auront
donné à réfléchir sur la condition humaine. Ils nous ont fascinés par leurs
dimensions fabuleuses et touchés par leur humanité.
sources pour la bibliographie
www.pensees-ecrites.net/auteurs-et-biographies/jean-racine