Adama Ndao, professeur de lettres modernes au lycée Ahoune Sané de Bignona, présentement au lycée Demba Diop de Mbour analyse ici ses lectures et des œuvres au programme dans l'enseignement du Sénégal. Abonnez-vous pour suivre les posts et l'actualisation des publications.
samedi 4 juillet 2009
samedi 25 avril 2009
L’Exil d’Albouri de Cheik Aliou Ndao
Introduction
On ne saurait aborder une quelconque pièce de théâtre négro africain sans faire un clin d’œil à la naissance du théâtre africain d’expression écrite en tout cas. Ce théâtre est né à l’école normale William Ponty de Sébikotane. Selon Bakary Traoré, des élèves de cette école jouaient des improvisations qui ont émerveillé le directeur de l’école. Celui décide que le théâtre soit intégré dans les activités scolaires, ainsi sont nées de vraies pièces africaines. Depuis lors des chefs d’œuvres ont vu le jour. On peut citer : La tragédie du roi Christophe du martiniquais Aimé Césaire, Le Lion et
I. Rappels historiques
Fils de Birame Penda, cet homme est issu d’une vieille famille régnante du Djoloff. Sa généalogie que nous trace son petit-fils Mansour Bouna Ndiaye, le rattache au fameux Ndiadiane Ndiaye, le fondateur du royaume Djoloff. Contemporain de Soundiata Keïta, Ndiadiane Ndiaye a régné sur le Djoloff de 1200 à 1249. C’est le fameux Diolofin-Mansa que devait combattre le preux Tiramakhan Taraoré pour le compte de Mansa du Manding, Makhan-Soundiata. Alboury Ndiaye, descendant direct de ce Djolofin-Mansa, était un vrai prince, un nationaliste convaincu et désintéressé qui, dans sa résistance acharnée et tenace contre l’intervention française, ne distinguait pas la cause du Sénégal de celle du Soudan, pays profondément islamique en lutte pour la liberté de l’Afrique.
Pour des raisons de sécurité, Alboury avait été envoyé très jeune à la cour du Damel Biram Ngoné Latyr où il a été élevé en même temps que le futur Damel, Lat Dior Diop, descendant du pieux et vénéré Sakhéwar Fatma. Et pendant de nombreuses années, Alboury a été le compagnon assidu, le lieutenant fidèle de Lat Dior dont il partagea les victoires, les défaites, les exils volontaires ou forcés.
Ahmadou Cheikhou, en 1875, à la tête d’une importante troupe, envahit le Cayor. Et Lat Dior informé forme avec le prince Alboury Ndiaye une expédition et poursuivent les fuyards jusque dans son pays natal, le Djoloff, où il se fit reconnaître comme le successeur légitime des Bourba Djoloff.
Alboury devait régner quinze ans, de 1875 à 1890. Un an après son avènement, il envoya à M’Boumba, au Fouta-Toro non loin de Boghé, une armée commandée par son frère Alboury Penda, qui en revint victorieux.
En 1886, les français rompirent le traité de paix, tuèrent Lat Dior et prétextant qu’Alboury avait violé ledit traité en refusant d’envoyer son fils à l’école française.
Dans son exil Alboury laissa derrière lui une capitale Yang yang incendiée, des récoltes brûlées et des puits bouchés ou empoisonnés ne laissant rien à l’envahisseur blanc Dodds. Celui-ci se vengea en nommant comme Bourba-Djoloff le propre frère d’Alboury, Samba Laobé Penda, cet autre ambitieux qui, aux côtés du jeune Damel Samba Laobé Fall, avait préparé la fameuse bataille de Guilé.
Comme il a été confirmé plus tard, Alboury désirait voir créer un grand empire musulman de l’Ouest africain, placé sous
II. Vie et bibliographie de l’auteur
1. la vie de l’auteur
De son vrai nom Sidi Ahmed Alioune Cheik Ndao, célèbre avec Cheik Aliou Ndao est né en 1933 à Karthiak près de Bignona. Fils d’un vétérinaire, il suit son père à travers tout le Sénégal. Il affirme être formé dans la meilleure école, celle des vieillards avec leur sagesse populaire. Il connaît très bien les traditions de son peuple, et surtout l’histoire de son peuple.
Il a fait une partie de ses études secondaires à Dakar et en France, puis il a fréquenté l'Université de Grenoble en France et de Swansea en Grande-Bretagne. Ancien professeur d'anglais à l'Ecole Normale William Ponty. Il a également enseigné aux Etats-Unis en 1972 à De Pauw University de Greencastle (Indiana). Il fut aussi un conseillé culturel auprès du Président de
2. Les publications
Son premier recueil de poésies, Kairée publié en
Sa pièce de théâtre, l'Exil d'Albouri (1967) a été mise en scène en 1968 au théâtre Daniel Sorano de Dakar, et a été jouée sur de nombreuses scènes africaines et européennes, notamment à l'Odéon (Paris), ainsi qu'en Belgique. Présentée au Festival culturel panafricain d'Alger en 1969, elle obtint le premier prix. Traduite en anglais aux Etats-Unis, cette pièce symbolise les débuts du théâtre historique sénégalais. On recense aussi L’Ile de Bahila en 1975,
Sa nouvelle Le Marabout de la sécheresse publié en 1979 est souvent étudiée dans les programmes scolaires.
Partisan de la transcription des langues africaines, Cheik Ndao est l'un des rares écrivains Sénégalais a avoir publié un roman en Wolof Buur Tillen, le roi de
III. La structure de l’œuvre
La pièce se structure en neuf (9) tableaux.
- Le premier tableau s’ouvre sur une opposition anodine entre Beuk nek et le griot Samba. Celui-ci doit convoquer le peuple à la réunion sous l’arbre à palabre pour le couronnement du Prince Laobé Penda.
- Le second tableau débute par l’assemblée du roi pour délibérer sur la décision du gouverneur qui a rompu l’accord avec les royaumes et lève ses spahis contre eux. Devant une discussion passionnée, le roi lève la séance. Ce tableau se termine par une discussion opposant la sœur du Roi, Linguère Madjiguène à la reine Sêb Fal qui réclame son rôle d’épouse, de femme.
- Le troisième tableau est le moment d’une deuxième assemblée après la décision de Bourba de s’exiler vers Ségou, et former une alliance avec lui. Laobé Penda est d’avis qu’il faut rester et mourir pour le trône. Les autres Diarafs se rangent de son côté, sauf le Diaraf des Esclaves. Le Prince a déjà convaincu une partie de l’armée.
- Le quatrième tableau présente la conspiration de Laobé Penda. Il ordonne à ses soldats de tuer le Diaraf des Esclaves qui les espionnait.
- Le cinquième tableau se déroule chez
- Chez le roi dans le sixième tableau, la reine Sêb entre dans une conversation intime avec son mari. Le roi décide qu’elle ira chez ses frères au Cayor, et non de prendre part à l’exil. Samba arrive avec la nouvelle de la traîtrise de Laobé Penda qui pactise avec le Gouverneur, et lui informe qu’il vient d’assassiner le Diaraf des Esclaves.
- Dans le septième tableau, on assiste à la dernière réunion du roi avec le peuple qui accepte de le suivre plutôt que de rester esclave.
- Dans le huitième tableau, on découvre le roi et sa suite dans le chemin de l’exil attendant son arrière-garde conduit par son Beuk nek. Samba profite de cet escale pour lui annoncer que la reine est du voyage. Elle se découvre au roi, et demande pardon à Reine Mère et fait la paix avec Linguère. L’arrivée de Beuk nek clôt ce tableau.
- Le tableau neuf coïncide avec la levée du camp. Moment saisi par Bourba pour parler des difficultés qui attendent le convoi, la faim, les animaux dangereux, le climat hostile. L’épilogue résume la fin tragique d’Albouri qui va mourir dans la bataille, et la dispersion du peuple de Ndiandiane Ndiaye entre Kano, Médine et Ségou.
IV. Le résumé
La pièce s’ouvre sur une atmosphère de fête de nomination du Prince Laobé Penda, dont le courage et la vaillance sont connus dans tout le Djolof. La place de Yang yang est le lieu de cette intronisation. C’est à ce moment qu’un guerrier vient annoncer l’invasion imminente du royaume du Djolof par le Gouverneur qui vient de rompre les traités qu’il avait signés. Afin de faire face à la menace, le roi Albouri convoque une réunion pour permettre à l’assemblée de se prononcer, mais il sera obligé de suspendre la séance à cause des esprits qui s’échauffent. En tête à tête avec son frère, Bourba lui annonce sa décision de s’allier avec les autres rois contre l’armée du gouverneur. Rien que la décision d’aider le roi de Ségou, Ahmadou fait entrer Laobé Penda dans une colère ; il s’oppose à la décision de son frère.
En effet Laobé Penda ne peut cacher son indignation devant ce qu’il considère comme une fuite indigne d’un descendant de Ndiandiane.
Laobé Penda va même jusqu’à convaincre une partie de l’armée à le suivre, et il fait le partage des munitions entre les soldats.
Au moment où Albouri devisait avec sa femme
V. Les personnages
Le Roi Albouri Ndiaye : Il naquit en 1842 à Thial. Le dramaturge a pour projet une œuvre de mythe. Albouri ou « Bourba » est le Roi du Djolof, et vit à Yang yang sa capitale. Il est présenté comme un combattant courageux, mais aussi comme un roi plein de sagesse. Il posé, calme comme tout bon roi. Aussi dans les moments de crise, il propose de « réfléchir en paix » avant de prendre une décision. Après un long séjour à
Le Prince Laobé Penda : Tout comme son frère, il est courageux, et d’ailleurs il considère le combat comme un devoir, ce qui lui a valu la récompenses du roi son frère. Contrairement à son frère, Laobé Penda est spontané, impulsif et fougueux. Avare en parole, il est un homme d’action. Le roi le connaît trop bien pour dire de lui qu’il «est très irréfléchi quelquefois » (p.55). Et le Diaraf de Thingue dit de lui la même chose : « Trop de précipitations, Laobé Penda » (p.58). Aussi a-t-il tenu coûte que coûte à combattre pour la protection du trône. Mais contre toute attente, il va pactiser avec le gouverneur, en se soumettant.
Beuk Nek : Il est le bras droit fidèle de Bourba. Il fait partie de la race des grands guerriers. D’ailleurs c’est lui qui va prendre la tête de l’arrière garde du roi et infligé une petite défaite à l’armée de Laobé Penda et les Sofas du gouverneur.
Samba : Il est le griot attitré du roi Albouri. Il incarne le syncrétisme religieux, et ne s’en cache pas. Loin d’être hypocrite comme le lui crache Beuk nek, il passe pour quelqu’un qui n’a pas peur de dire la vérité. Il n’a pas besoin d’être présenté puisqu’il le fait : « Pourtant, qui ose se vanter d’avoir le quart de mon savoir ? » lance-t-il Beuk nek.
Le Diaraf de Thingue : Il gouverne la province de Thingue. C’est un autre combattant de l’armée du roi. Il est consulté par le roi sur les épineux problèmes d’Etat. Mais il se rangera du côté de Laobé Penda. Il sera tué par le bataillon de Beuk nek.
Le Diaraf de Varhôh : Il gouverne Varhôh, là où se trouve la cavalerie de l’armée du Djolof. Comme le Diaraf de Thingue, il soutiendra le Prince Laobé Penda.
Ardo : C’est un chef guerrier peulh. Très lucide pour comprendre le Bourba, mais il va se ranger du côté du Prince.
Le Diaraf des Esclaves : C’est le seul à soutenir le roi Albouri, et jusqu’à le payer de sa vie en le servant comme espion.
VI. Les thèmes
- La trahison
Ce thème est très présent dans le texte. D’abord, en déclarant qu’ils obéissaient au doigt et à l’œil le Bourba, Les Diarafs de Thingue et de Varhôh et Ardo n’ont pas hésité à l’abandonner, surtout parce que Laobé Penda avait mobilisé l’armée pour assiéger l’assemblée. Et ils se réunissaient chez le Prince à l’insu du Bourba, ce que d’ailleurs le Diaraf des Esclaves a découvert.
Ensuite, non content d’être opposé à son frère, prétextant la défense de l’honneur, Laobé Penda ne s’est pas gêné à trahir le peuple en acceptant le protectorat du gouverneur.
D’un autre côté, le gouverneur fut le premier traître car, ayant signé un traité, il le rompt sans aviser les cosignataires, mais surtout il les attaque à l’improviste.
- L’honneur
L’honneur, ou le « jom » au Sénégal a toujours été la raison de vie des rois. Dans
- L’exil
L’exil au sens d’Albouri, n’est une fuite, ni un exode, mais plutôt une façon de reculer pour attaquer, et surtout une manière de chercher des alliers pour faire face à la puissance de feu de l’armée du gouverneur. Finalement pour le peuple, l’exil était le seul moyen de rester sauf et digne. Aussi la dernière assemblée tenue par le roi est rythmée par le slogan du peuple : « L’exil plutôt que l’esclavage » (septième tableau pp.80-81). Le vrai motif de l’exil apparaît ainsi à la page 89 quand le roi Albouri s’adresse au peuple qui l’a suivi, c’est que, dit-il « les bottes ennemies ne marcheront pas sur nos cadavres ».
- Le rôle de la femme
A travers surtout les conversations, on note une volonté du dramaturge de montrer les différents rôles que les femmes occupent dans la vie de Cour, dans la vie tout court du Djolof. La femme du foyer est surtout là en filigrane, avec les revendications incessantes de la reine Sêb Sa conversation avec Linguère laisse apparaître l’amour de cette femme envers son mari, amour qu’elle n’attend qu’à exprimer : « Ô vois mes seins qui bourgeonnent ! Toutes les nuits se retourner seule dans son lit, les yeux ouverts. » (p.40), et ajoute-t-elle à l’endroit de sa belle-sœur : « Je suis femme avant d’être Reine. ». Elle veut ainsi au moins avoir un ou une enfant et vivre la maternité : « Un enfant ! Albouri, un enfant : » (p.74). Pour dire que la femme quelle que soit la situation, elle joue un rôle à côté de son mari. Aussi les femmes sont de vraies guerrières quelquefois à l’image de Linguère. Et
- Le courage
Le courage est présent chez tous les sujets du Djolof. Et on ne s’étonnera nullement si
VII. La dramaturgie de Cheik Aliou Ndao
- Vérité historique et mythe
« Mon but est d’aider à la création de mythes qui galvanisent le peuple et portent en avant. » affirme le dramaturge dans son prologue. On comprend donc sa façon de traiter l’histoire qu’il connaît. Et à travers le traitement qu’il fait subir à l’histoire on voit comment il a participé à immortaliser le roi Alboury. « On a le droit de violer l’histoire si c’est pour lui faire de beaux enfants » écrivait….. Justement Cheik Aliou Ndao a réussi à rétablir une vérité historique dans cette pièce en utilisant une dramatisation qui rend compte de la vie de Cour du grand conquérant le Bourba Djolof. Sa manière d’être réaliste a permis de rendre accessible le sens des gestes, des paroles et des actions.
- Une tragédie poétique
Hormis les envolées de Samba, on note que le dramaturge joue sur les réunions pour créer une poésie bien africaine, faite de rythme par la répétition, les incantations et les exclamations lyriques. Le texte débute par une célébration du soleil par Samba. « Ô Soleil, Souffle du Buffle sur les savanes ! Voilà que tu souris, au sortir de ta nuit de noces avec
D’ailleurs les paroles du roi sont souvent et régulièrement entrecoupées de scansions du peuple, et de scansions très asymétriques pour reprendre Senghor. « Diâta ! Diâta ! ô Lion » / « Ndiaye ! Ndiaye » / « Diâta ! Ô Ndiaye ! ». De même ce type de refrain du peuple se retrouve au dernier tableau ainsi : « L’exil, l’exil plutôt que l’esclavage ! » / « L’exil plutôt que l’esclavage ! »
Conclusion
Une tragédie africaine, L’exil d’Albouri ne se présente plus parce que l’homme, le héros est un noble, un roi, un preux, comme dans les tragédies grecques ou plus récemment dans les tragédies classiques. Chose extraordinaire, c’est que du point de vue formel, la pièce de Cheik Aliou Ndao n’a rien d’occidental, mais les valeurs portées par les personnages rejoignent étrangement des valeurs occidentales gréco-romaines par exemple. La chose politique, l’honneur, la famille, l’amour, le choix décisif sont autant de points communs qui peuvent légitimer le théâtre africain comme un théâtre complet. La réussite de l’auteur vient du fait que de 1967 à nos jours, cette pièce continue de nous apprendre des choses, de participer à la fierté de la jeunesse noire qui peut se regarder à travers le personnage d’Albouri. Retenons que l’exil choisi est ici un moyen de se rapprocher de celui qui épouse notre idéal, celui qui est le plus proche de nous malgré les divergences qui peuvent régner entre nous. Mais aussi l’exil signifie aussi liberté, dignité gardée. Victor Hugo a ainsi expliqué son exil : « Je resterai proscrit, voulant rester debout ».
Sources : internet : article de Bocar Cissé « ALBOURY NDIAYE, DERNIER GRAND BOURBA DU DJOLOF » Revue Ethiopiques numéro 19, juillet 1979
mardi 14 avril 2009
La responsabilité dans Vol de nuit de Saint Exupéry
PLAN
Introduction
I. Qu’est-ce que la responsabilité ?
II. La responsabilité des pilotes
III. Travail et responsabilité
IV. Responsabilité et liberté
Conclusion
Introduction
Le travail quel qu’il soit doit être un moment d’accomplissement d’une tâche. Ainsi, le responsable dans un travail est souvent celui qui doit être récompensé positivement ou négativement. Voilà pourquoi le travail de l’aviation est un moment pendant lequel on peut mesurer la responsabilité de chaque agent. La responsabilité est donc un engagement de la part des pilotes, mais également de toute l’équipe autour du chef de la compagnie Rivière. Afin d’analyser la responsabilité dans le roman Vol de nuit, il semble nécessaire d’étudier tour à tour la signification de la responsabilité, la responsabilité des pilotes, et enfin la relation entre le travail à faire et l’engagement responsable des différents acteurs.
I. Qu’est-ce que la responsabilité ?
- Définition de la notion
Selon le dictionnaire, la responsabilité est définie comme une obligation faite à une personne ou une institution de répondre de ses actes du fait du rôle ou des charges que la personne doit assumer et d’en supporter toutes les conséquences. Et faut-il ajouter que le responsable suppose une acceptation et un engagement à remplir sa mission et à en subir toutes les conséquences, suite à un dommage quelconque. Quand il s’agit de la responsabilité de chaque membre dans une compagnie comme celle dirigée par le chef Rivière, toute décision ou acte oblige le travailleur à rendre des comptes.
- La responsabilité selon les personnages
Le mot responsable a un sens bien entendu général ; toutefois dans Vol de nuit chaque personnage a une certaine compréhension de son rôle, c’est-à-dire de sa responsabilité. Pour Rivière par exemple la responsabilité est une lourde tâche et elle est synonyme de vies humaines qu’on tient entre les mains. D’ailleurs il est comme Tantale ou Atlas qui a porté le monde sur ses épaules, donc il en est responsable. Et voilà pourquoi il dit à Robineau : « Vous disposez presque de la vie des hommes ». Ce que Robineau lui-même sait bien car il affirme à son tour à Pellerin la gravité des décisions qu’il doit prendre (p.61). La responsabilité est si lourde que Rivière ne restait jamais tranquille tant que ses avions étaient au ciel du moment qu’il était le « responsable du réseau entier » à lire à la page 32. Le narrateur est d’ailleurs d’accord avec lui parce qu’il fait du courrier un travail où les pilotes sont responsables du bonheur des gens qui doivent recevoir les lettres. (p.44)
II. La responsabilité des pilotes
- Le pilote et son appareil
Ici chaque pilote est responsable d’abord de son outil de travail, l’avion. En plein vol, c’est son compagnon, le radio qui se charge d’établir le contact avec l’équipe au sol. Cependant, l’entretien des moteurs est sous la responsabilité des mécaniciens et des manœuvres. Cette responsabilité fait que chaque pilote, quelle que soit sa situation dans le ciel doit ramener au sol son appareil.
On comprend dès lors que Robineau critique « le montage d’une pompe du type B6 le confond avec une pompe à un type B4 » (pp.51-52).
- Le pilote et son coéquipier
Autant le pilote est responsable de son appareil, autant aussi il est responsable de son coéquipier, et même d’autres personnes, on pense à sa femme, ou sa famille, aux autres personnes qu’il ne connaît pas et qu’il tient le bonheur dans ses mains. C’est pour cette raison qu’à la page 71 la responsabilité de Fabien nous est suggérée par le narrateur de l’histoire : « le radio pensa qu’après tout le pilote était responsable …. ».
Au total, chaque pilote est responsable de lui-même et de son outil de travail. Responsable aussi des hommes (femme et camarades), Fabien « tenait dans ses mains le cœur battant de son camarade et le sien » (p. 138)
III. Travail et responsabilité
- La grandeur de la mission
La femme du pilote du courrier d’Europe aura compris la grandeur du pilote son mari quand elle avance que « dans une heure, [les bras de son mari] porteraient le sort du courrier d'Europe, responsables de quelque chose de grand, comme du sort d'une ville. Et elle fut troublée. Cet homme, au milieu de ces millions d'hommes, était préparé seul pour cet étrange sacrifice ».
- La sanction du responsable
La sanction est toujours la conséquence qui découle d’une responsabilité engagée. Dans Vol de nuit, la responsabilité est l’accomplissement d’un devoir, et tout acte responsable est sérieusement sanctionné positivement ou négativement par Rivière qui est ici le chef qui doit appliquer le règlement. Ainsi après la réussite du pilote Pellerin, Rivière le félicite indirectement quand il dit « comment avez-vous réussi ? » (p.42). Par contre toute faiblesse entraîne une punition envers le responsable. Roblet, le responsable d’un mauvais travail, sera renvoyé. Pourtant c’est lui qui a monté le 1er avion de
IV. Responsabilité et liberté
Accepter un travail, c’est donc a priori être libre, puisqu’on a le choix. Mais c’est aussi a posteriori être responsable de tout acte exécuté durant l’accomplissement de son travail. Ainsi on n’objectera pas, « je ne l’ai pas fait exprès » à Rivière du moment qu’il dit « ce n’est pas lui que j’ai congédié ainsi brutalement, c’est le mal dont il n’est pas responsable, mais qui passait par lui. » (p. 86). Si les pilotes sont plus libres au ciel, il n’en est pas de même pour les autres au sol, l’inspecteur, les secrétaires, les manœuvres, etc.
Dans Terre des hommes de Saint-Exupéry, Guillaumet était responsable de lui, du courrier et des camarades qui espèrent (…) responsable un peu du destin des hommes, dans la mesure de son travail. »
Cette responsabilité est aliénante dans la mesure où l’homme est mu par une force intérieure incontrôlable. Aussi l’homme ne peut-il prétendre à une liberté absolue :
« Ces plaines, ces villes, ces montagnes… Il (l pilote du courrier d’Europe) partait libre, lui semblait-il, à leur conquête. » (p. 95)
Conclusion
Comme on vient de le voir, la responsabilité se trouve partout dans le roman, puisqu’elle accompagne non seulement l’accomplissement d’un devoir, mais également le seul fait d’accepter de faire ce devoir. Ainsi la responsabilité est d’autant plus grande si on est responsable de la vie des hommes. Rivière tient entre ses mains la vie de ses pilotes à qui il impose des vols de nuits dangereux, les mécaniciens sont responsables de la sécurité des moteurs et des avions, et les pilotes, des bonheurs des propriétaires des courriers. Donc chacun est responsable dans cette chaîne de la vie. On retiendra qu’être responsable, c’est accepter un devoir et le remplir sous peine de sanctions.
Le plan détaillé en dissertation
Sujet : Dans la préface de son recueil poétique Les Orientales , Victor Hugo écrit : « tout est sujet ; tout relève de l'art ; tout a d...