jeudi 13 mars 2008

L’Ecole des femmes* de Molière

L’Ecole des femmes* de Molière

Introduction

La comédie. Une pièce destinée à faire rire. Et pour dire la fonction de sa comédie, Molière dit « Castigat ridendo mores », autrement « Il châtie les mœurs par le rire ». Et pour cause, Jean-Baptiste Poquelin de son vrai nom, exploite les caractères des hommes pour composer L’Ecole des femmes. Pour résumer le monde de cette pièce dans La Critique de l’école des femmes, par la voix d’Uranie, il note « ce qui me paraît plaisant, c’est qu’un homme qui a de l’esprit, et qui est averti de tout par une innocente (…) et par un étourdi (…) ne puisse avec cela éviter ce qui arrive ».
Afin d’analyser le texte, nous étudierons tour à tour la vie et l’œuvre de Molière, le résumé de l’action et la structure de la pièce, la psychologie des personnages, et enfin les thèmes les plus saillants.

I. Vie et œuvre de Molière

1. La Biographie


De son vrai nom Jean-Baptiste Poquelin, Molière naquit à Paris le 15 janvier 1622. Son père, un bourgeois parisien est le tapissier du roi, fournisseur officiel de la Cour. Son enfance fut marquée par des deuils successifs, surtout la mort de sa mère en 1632. Il fut élève par les jésuites au collège de Clermont, que fréquentaient les aristocrates et la grande bourgeoisie, puis fit des études de droit pour devenir avocat en 1640. Dès 1643, il décida, contre l’avis de son père, de devenir comédien. Et, avec sa maîtresse Madeleine Béjart, la famille de celle-ci et quelques autres comédiens, il fonda une compagnie théâtrale, baptisée « l’Illustre-Théâtre ».
L’année suivante, il prit la direction de la compagnie, sous le pseudonyme de Molière, qu’il choisit pour des raisons jamais élucidées.
Il serait mort durant la représentation de sa comédie Le malade imaginaire, en jouant le rôle principal, de malaise cardiaque le 17 février 1673, et il est inhumé à côté du roi grâce à l’intercession d’Armande Béjart.

2. Les œuvres

Si les quelque trente pièces que Molière écrivit se caractérisent par leur diversité — farces, comédies d’intrigues, comédies-ballets, grandes comédies, pièces à machines —, elles trouvent leur unité dans le rire. Le comique moliéresque a traversé les siècles : certains de ses personnages sont devenus des archétypes, ses pièces sont très souvent mises en scène et il tient une place majeure dans l’enseignement actuel.
Sa production gigantesque est centrée sur la politique. Retenons entre autres succès : Les précieuses ridicules (1659), L’école des femmes (1662), Tartuffe ou l’Imposteur (1664), Dom Juan ou le Festin de pierre (1665), Le Misanthrope (1666), L’Avare (1668), Les Fourberies de Scapin (1671), Les femmes savantes (1672), Le malade imaginaire (1673).
Des pièces avec musique sont créées pour les divertissements de la cour : la Princesse d’Élide (1664), l’Amour médecin ou les Médecins (1665), Mélicerte (1666), la Pastorale comique (1667), le Sicilien ou l’Amour-peintre (1667), Amphitryon (1668), George Dandin ou le mari confondu (1668), Monsieur de Pourceaugnac, (1669). De 1664 à 1671 le roi commanda en tout à Molière quinze pièces de théâtre, et la troupe ne cessa de faire des séjours à la cour, y donnant près de deux cents représentations (les Amants magnifiques (1670), le Bourgeois gentilhomme (1670), Psyché (1671), la Comtesse d’Escarbagnas (1671).
Ce sont ces liens privilégiés avec la cour qui expliquent l’importance dans l’œuvre de Molière du genre de la comédie-ballet, spectacle mêlant musique, danse et théâtre.

II. Résumé et structure de l’oeuvre

1. Le résumé : évolution de l’action

a) Les protagonistes


Arnolphe : (autrement M. de la Souche) 42 ans, tuteur d’Agnès.
Agnès : jeune fille innocente, pupille d’Arnolphe.
Horace : amant d’Agnès.
Alain : paysan, valet d’Arnolphe.
Georgette : paysanne, servante d’Arnolphe.
Chrysalde : ami d’Arnolphe, oncle d’Agnès.
Enrique : beau-frère de Chrysalde, père d’Agnès.
Oronte : père d’Horace et grand ami d’Arnolphe.
Le Notaire.

b) L’évolution de l’action

L’action peut être résumée en une quête, dont l’ « objet » n’est rien d’autre que l’amour représenté par le personnage d’Agnès. Selon qu’on considère Arnolphe ou Horace, les chemins pour parvenir à ses fins restent fondamentalement différents.
Il semble qu’Arnolphe est seul dans sa quête, personne apparemment ne l’aide. Et tout le monde s’oppose à sa quête, à commencer par son ami Chrysalde, son valet Alain et sa servante Georgette. En réalité, ils ne sont pas contre sa personne, mais bien sûr contre ses principes et ses moyens : détournement de mineur dira-t-on aujourd’hui ou séquestration, et même abus de confiance, pour ne pas dire de naïveté.

S’il passe pour un sérieux prétendant dès l’Acte d’exposition, il n’en demeure pas moins que dans l’Acte II, M. de la Souche (un surnom prétention) apprend qu’Agnès (une pupille – une orpheline solitaire) est réellement amoureuse d’Horace (un coup de foudre d’ailleurs) qui était entré dans la maison avec la complicité de son valet et de sa servante. Les enseignements d’Arnolphe semblent avoir un effet sur la jeune fille qui accepte lancer une pierre à Horace, mais celle-là l’avait enveloppée d’une lettre à l’Acte III. Dans l’Acte IV, il projette de marier la jeune fille quand il apprend qu’Horace veut s’enfuir avec elle. Dans le dernier Acte, Arnolphe fait rouer de coups de bâtons Horace par ses deux serviteurs. Horace, ignorant toujours l’identité d’Arnolphe sous le pseudonyme de M. de la Souche, lui confie Agnès. Enrique se découvre comme père d’Agnès, qu’il a eu avec la sœur de Chrysalde, Angélique (vers 1736 et suiv.). Il décide avec Oronte de la marier à Horace. Et le seul et dernier mot, une interjection en fait, qu’Arnolphe réussit à prononcer est « Oh ! » (vers 1764) traduit à la fois son regret et son impuissance. Et la vraie conclusion, et peut-être la moralité de l’histoire sortira de la bouche du meilleur ami d’Arnolphe au vers 1762-1763 : « Si n’être point cocu vous semble un si grand bien, / Ne vous point marier en est le vrai moyen. »

2. Structure de la pièce

La division de la pièce en 5 actes est une constante dans le théâtre classique. Elle obéit à une certaine progression de l’action. Mais en considérant l’histoire, la structure ressemble à celle un conte.
L’exposition ou situation initiale : elle présente les personnages principaux (Arnolphe, quarante-deux ans…), le lieu (une place de ville) et l’action (formulée dès la première réplique : le mariage).
Les coups de théâtre ou péripéties :
- Agnès chasse son soupirant à coup de pierre sous la demande d’Arnolphe ;
- Rebondissement : la pierre était enveloppée d’une lettre d’amour ;
- Arnolphe tombe vraiment amoureux de la jeune fille ;
- Horace est assommé en voulant s’introduire, la nuit, chez Agnès ;
- Horace enlève la jeune fille
- Rebondissement : il la confie à Arnolphe (M. de la Souche reprend son bien) ;

Dénouement ou situation finale : Un certain Enrique arrive pour marier sa fille, Agnès, au jeune Horace, fils d’Oronte, son ami.

III. Les thèmes dominants

1. L’éducation au 17ème siècle


En effet on attendait d’une femme quelle soit une bonne épouse, une bonne mère. Ce qui importe ainsi chez la femme, c’est qu’elle doit être vertueuse et non intellectuelle. Dans le même ordre d’idée, il fallait prémunir la femme des tentations et des jouissances matérielles. Au 17ème siècle, il y avait une inégalité des sexes. Ce thème est donc plus que d’actualité.
Le problème se pose, sachant que la mère d’Agnès, Angélique (l’onomastique donne quelqu’un qui est non seulement charmante, ravissante mais surtout céleste et divin) n’a pas été une ange pour qu’on tienne rigueur à sa fille qui ne respecte pas les préceptes éducateurs de son tuteur.
Il y a une sorte de critique à l’endroit des hommes qui veulent se protéger des manières des femmes et qui tentent de leur inculquer une quelconque leçon, car, en vérité, la seule leçon qui vaille en matière d’amour, et de mariage de surcroît, est qu’il n’y a pas a priori de leçon. En cela, Chrysalde a peut-être raison de dire : « Chacun a sa méthode. / En femme, comme en tout, je veux suivre ma mode. » Acte I, scène première.
L’amour est ici le grand maître, ce qui fait dire à Horace : « …enfin, cette aimable personne / A suivi les conseils que son amour lui donne, » Acte V, scène 2.

2. L’amour dans la pièce

La grande vérité, c’est curieusement Arnolphe, le soi-disant maître dans l’art du mariage qui l’affirme : « Il le faut avouer, l’amour est un grand maître : / Ce qu’on ne fut jamais il nous enseigne à l’être » Acte III, scène 4. Sans vraiment s’en convaincre ou s’en étant trop convaincu pour ne pas s’en apercevoir, Arnolphe croit savoir le degré d’intelligence des femmes jusqu’à dire : « Je sais les tours rusés et subtiles trames / Dont, pour nous en planter, savent user les femmes » v 75. « Et comme on est dupé par leurs dextérités », ajoute-t-il. En fait il avoue son impuissance, du moins la supériorité d’intelligence de la gent féminine. Même Agnès qui passait pour la naïve et, malgré le fait qu’Arnolphe veuille la maintenir dans l’ignorance, elle devient grâce à l’amour une rusée consciente de ses intérêts. Aussi répond-il à la proposition de mariage d’Arnolphe en ces termes : « Oui, mais, à vous parler franchement entre nous, / Il est plus pour cela selon mon goût que vous. / Chez vous le mariage est fâcheux et pénible, / Et vos discours en font une image terrible ; / Mais, las ! il le fait, lui, si rempli de plaisirs / Que de se marier il donne des idées. » Acte V, scène 4. Elle fera de son précepteur et tuteur, Arnolphe, l’arroseur arrosé. C’est que l’amour est plus apte à transformer la personnalité de l’individu que toutes les leçons du monde. Les effets spectaculaires sur Agnès sont hallucinants : « J’admire quelle joie on goûte à tout cela »
L’amour inspire à Agnès la liberté de s’affranchir de l’ignorance dans laquelle son tuteur a voulu l’enfermer.

3. Le cocuage

« Le cocuage n’est que ce que l’on le fait, / Qu’on peut le souhaiter pour de certaines causes, / Et qu’il a ses plaisirs comme les autres choses. » avance Chrysalde Acte IV, sc. 8.
Cette hantise d’être trompé est le principal ressort de cette pièce. Mais ce qu’ignore Arnolphe c’est qu’on ne peut pas anticiper sur la nature humaine. Molière a choisi ce nom d’ Arnolphe en souvenir du Saint Arnolphe, le patron des maris trompés. Donc il y a une sorte de prédestination dans le personnage, il appartient fatalement à ceux seront cocus, quoi qu’il fasse. Aussi tout au long de la pièce, tous les talents de maître (ce qui justifie le titre « l’école ») qu’il déploie vont être un coup d’épée dans l’eau.
A travers ce thème, se glisse tout le comique de caractère, et même de geste : on peut relever un comique de geste à la page 36 lorsque Arnolphe reçoit le coup d’Alain destiné à Georgette. Notons également le comique dans la rime « écus » et « cocus » v 301-302. Le surnom d’Arnolphe (M. de la Souche) fait qu’Horace l’insulte presque toujours sans le savoir, et lui non plus ne peut se faire connaître, est un comique de situation (p. 44). Enfin le comique de mot quand Alain dit « strodagème » pour dire stratagème (p. 36).
L’ironie, cette figure du langage menteur – dire le contraire de ce que l’on pense – traduit le cocuage des maris dans le vers 296 suivant : «…les femmes y sont faites à coqueter / … et les maris aussi les plus bénins du monde », dit Arnolphe.

IV. La langue de Molière

1. Les expressions de l’époque

La règle de bienséance impose une certaine façon de s’exprimer des personnages. Pour respecter cette règle, Molière, spécialiste de la langue française, use souvent de périphrases ou d’expressions de pudeur. Quand il s’agit de sentiments amoureux et pour nommer les femmes, Arnolphe dit à la scène 3 de l’Acte I « Héroïnes du temps, Mesdames les savantes, / Pousseuses de tendresse et de beaux sentiments ».
Toutefois, la pudeur et la bienséance se retrouvent surtout quand il s’agit de parler de mariage. Chrysalde, pour dire qu’Arnolphe va épouser Agnès dans la première réplique du texte « Vous venez, dites-vous, pour lui donner la main » ; et voici la répartie d’Arnolphe « Oui, je ne doute point que l’hymen ne vous plaise ». Sinon le mot mariage est remplacé par « hymen » pour insister sur son caractère intime et le mot « nœud » pour insister sur le lien. Chrysalde, à la scène 8 de l’Acte IV questionne par ironie Arnolphe « Votre hymen résolu ne se fera-t-il pas ? ». Dans la tirade de l’Acte III, scène 2, Arnolphe dit à Agnès « Vous devez toujours, dis-je, avoir devant les yeux / Le peu que vous étiez sans ce nœud glorieux ».
La langue classique, semble-t-il, était plus proche de la réalité, du concret. Pour dire émotion, il y avait « transport » et on traitera quelqu’un de cocu quand on lui dit qu’il porte des cornes. Et à la fin de la pièce, la dernière réplique d’Enrique, après avoir revu sa fille, lance un soupire : « Ah ! ma fille, je cède à des transports si doux ».

2. Une langue à l’air du temps

La langue classique ici, comme toute langue d’ailleurs, traduit l’esprit de l’époque. Ainsi la femme est considérée comme un « objet » qu’il faut obtenir par des transactions commerciales, ce qui explique la dot à donner et les occurrences des mots « article » pour désigner la jeune fille. « Pour cet article-là » lit-on à la page 32 ou « un jeune objet qui loge en ce logis », dit Horace faisant allusion à Agnès (p. 44).
Le mot « fortune » renferme les sens de destin, hasard, alors que le feu et les mots de la même famille (flamme, braise) renvoient à l’amour ardent, disons à la passion destructrice. Le terme « mort » est remplacé par le non moins familier « trépassé ». Un « godelureau » est un jeune homme qui fait le beau pour Arnolphe ; et « murmure » signifie « refus » : « Je vous ai conseillé, malgré tout son murmure, / D’achever l’hyménée » Acte V, scène 9. Par ailleurs, les mots concrets servent à désigner les abstractions : « un transport difficile » veut dire « une pénible émotion ».
Au plan syntaxique, remarquons que le pronom personnel se place ordinairement avant l’infinitif et l’adjectif : « Pensez-vous le bien prendre… ? » demande Chrysalde à Arnolphe ; et Horace lui dit à son tour « Et m’écrit qu’en chemin ensemble ils se vont mettre ». Oronte dans la scène 9 de l’Acte final s’exclame : « Dites-nous ce que c’est que ce mystère-ci / Nous nous regardons tous, sans le pouvoir comprendre ».
Ces quelques exemples sur plusieurs permettront sans nul doute au lecteur de Molière d’être plus indulgent et plus patient pour lire ce français passé de mode, mais somme toute très beau.

Conclusion

L’Ecole des femmes a réussi à fondre le comique dans la réalité de l’époque, c’est-à-dire dans les caractères des contemporains du comédien Elomire Hypocondre, son autre pseudonyme. Cette peinture de la société véhicule une philosophie de la vie fondée sur le respect du naturel humain et des prédispositions des hommes. Lire ou voir une pièce de Molière reste toujours un plaisir, car on apprend sans s’ennuyer, tellement le rire et l’humour tiennent en haleine le lecteur-spectateur, et se diluent dans une langue simple et un style pur. Le seul hic pour un lecteur du 21ème siècle, c’est qu’il lui faut parcourir également les notes, dès fois nombreuses, pour une nette compréhencion de la pièce classique. Voilà aussi pourquoi certainement on utilise la périphrase « la langue de Molière » pour dire le « français ».

Travail d’approfondissement : le thème du conflit de génération ou des âges ; le rôle de la femme ; le hasard et volonté, la jalousie.
Dans la tirade d’Arnolphe à la scène 2 de l’Acte III, on relève les idées suivantes :
« Le mariage, Agnès, n’est pas un badinage,
A d’austères devoirs le rang de femme engage » (vers 695-696)
« Votre sexe n’est là que pour la dépendance :
Du côté de la barbe est la toute-puissance. » (699-670)
Commentez et discutez les propos de ce personnage.

La parole proverbiale dans L’Ecole des femmes
« …qui rit d’autrui / Doit craindre qu’en revanche on rie aussi de lui » Chrysalde Acte I, scène 1.

6 commentaires:

Lireunlivreplaisir a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
mounii a dit…

C'EST UN TRAVAIL BIEN FAIT ET JE REMERCIE LE PROFESSEUR!

Unknown a dit…

mais quelle scene exactement explique le conflit de genration ????

Baye barhame drame a dit…

S'il vous plaît les gars aider moi car je n'arrive pas à télécharger les documents.

Unknown a dit…

Pourquoi ils n'ont pas résumé les actions

Unknown a dit…

C op mal mais j'ai besoin du résumé de l'oeuvre le thème de l'éducation et mariage contrarié